Le système judiciaire de la République d’Haïti

  • Dans le cas du système judiciaire de la République d’Haïti, le Pouvoir Judicaire, selon l’article 173 de sa Constitution en vigueur, conformément au principe de la légalité juridictionnelle, est exercé par : la Cour de Cassation, les Cours d’Appel, les Tribunaux de Première Instance et les tribunaux spéciaux dont le nombre, la composition, l’organisation, le fonctionnement et la juridiction sont fixés par la loi. Les juridictions de l’ordre judiciaire sont notamment compétentes pour le pénal et pour régler les litiges entre particuliers (le civil). On peut donc diviser les juridictions de l’ordre judiciaire en deux catégories : les juridictions dites de droit commun (1) et les juridictions spécialisées (2).
  • Les juridictions de droit commun : Suivant le principe du double degré de juridiction, on distingue les juridictions du premier degré et celles du second degré, le tout coiffé par la Cour de Cassation qui ne constitue pas pour autant un troisième degré.

a) Les juridictions du premier degré.- Les juridictions du premier degré sont celles par devant lesquelles on peut porter une affaire pour la première fois en vue de son examen au fond par un juge unique. On y retrouve les Tribunaux de Paix (188 actuellement) qui sont établis dans les communes et les Tribunaux de Première Instance qui ont plénitude de juridiction (15 juridictions) ; ils connaissent de toutes les affaires (civiles, commerciales, maritimes et criminelles) dès lors qu’une loi spéciale n’en attribue pas la connaissance à un Tribunal Spécial. Ils ont également des attributions propres : en matière d’état des personnes et de relations familiales (état civil, nationalité, changement de régime matrimonial, filiation, succession, etc.), en matière immobilière (actions relatives aux droits de propriétés des immeubles, de saisies immobilières, des questions relatives aux baux à construction, ainsi que d’expropriation), en matière d’exécution des jugements et des titres exécutoires, etc.

Près le tribunal de Première Instance est institué un parquet dirigé par le Commissaire du Gouvernement. Ce dernier représente la société (et non pas l’État ou le Gouvernement) en requérant l’application de la loi, mais le juge n’est pas tenu de déférer à ses réquisitions. Il est partie jointe dans les procès civils et partie principale dans les procès pénaux où son rôle est primordial car à l’audience c’est à lui qu’incombe la charge de la preuve de l’agression (il doit soutenir l’accusation et requérir une peine pour l’agresseur).

Il faut souligner que le Commissaire du Gouvernement est le chef de la police judiciaire. Il fait procéder ou procède à tous les actes nécessaires à la recherche et à la poursuite des infractions (délits ou crimes) dont la connaissance appartient aux tribunaux civils jugeant au correctionnel ou au criminel et contrôle les mesures de garde à vue. Il peut poursuivre (c’est-à-dire mettre l’action publique en mouvement) même en l’absence de plainte de la victime ou en l’absence de dommages (par exemple en cas de tentative échouée ou de retrait de plainte). Il peut poursuivre sans l’ordre ou même contre l’ordre de son supérieur hiérarchique qui est le Ministre de la Justice (Article 35 de la loi portant statut de la magistrature en date du 27 Novembre 2007).

b) Les Juridictions du second degré.- Les juridictions du second degré connaissent des appels des décisions rendues au premier degré. L’appel est un rejugé, un nouvel examen de l’affaire par un juge différent qui a le pouvoir de confirmer ou d’infirmer le jugement rendu en Première Instance. Parmi les juridictions du second degré on retrouve : les Cours d’Appel qui sont au nombre de cinq et les Tribunaux de Première Instance qui connaissent des appels des sentences rendues par les Tribunaux de Paix ou de Police. On peut toutefois hésiter à placer ces juridictions parmi celles du second degré car, au principal, elles sont chargées de rendre les décisions de Première Instance et ce n’est qu’à titre subsidiaire qu’elles connaissent des appels des Tribunaux inférieurs. Il s’agit donc d’une juridiction hybride, à la frontière du premier et second degré.

  • Les juridictions spécialisées : Pour répondre à un besoin d’efficacité technique, la législation haïtienne a institué diverses juridictions dites spécialisées en vertu de leur compétence rationae materiae limitée à une matière spéciale. On en compte plusieurs : Les Tribunaux pour Enfants, le Tribunal du Travail et les Sections Terriennes.
  • La Cour de Cassation : La Cour de Cassation est la plus haute juridiction de l’ordre judicaire haïtien et a son siège au Palais de Justice de Port-au-Prince. La Cour de Cassation, n’étant pas un troisième degré de juridiction, ne connaît pas du fond des affaires ; lorsqu’elle casse une décision elle renvoie l’affaire devant une autre juridiction de même degré que celle qui l’avait rendue. Néanmoins, en toutes matières autres que celles qui sont soumises au jury, lorsque sur un second recours (même sur une exception) une affaire se présente entre les mêmes parties, la Cour de Cassation, admettant le pourvoi, ne prononce pas de renvoi et statue sur le fond en sections réunies. Dans ce cas, la Cour siège avec une majorité de juges n’ayant pas connu de l’affaire lors du premier recours. Les sections réunies en audience solennelle connaissent : Des pourvois en second recours ; Des demandes en révision des procès criminels ; Des demandes en inconstitutionnalité des lois.

La Cour de Cassation se compose d’un président, d’un vice-président, de dix juges, d’un greffier en chef, de sept greffiers, de trois huissiers audienciers et de six huissiers exploitants. Il y est attaché un parquet composé d’un Commissaire du Gouvernement, de trois substituts et de trois commis du parquet. Elle se divise en deux sections qui siègent chacune séparément ou se réunissent en audience solennelle.

Elles peuvent en outre se réunir en Assemblée Générale ou en Conseil Supérieur de la Magistrature (organe actuellement remplacé par le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire créé par la loi du 27 décembre 2007 dont la mise en place est en cour).

  • Le pouvoir judiciaire est régulé aujourd’hui par la mise en place du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ) selon l’article 184.2 de la Constitution amendée stipulant ce qui suit :

« L’administration et le contrôle du Pouvoir Judiciaire sont confiés à un Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire qui exerce sur les magistrats un droit de surveillance et de discipline, et qui dispose d’un pouvoir général d’information et de recommandation sur l’état de la magistrat »